Impact de la crise de la biodiversité sur l’environnement et la société
Un million d’espèces, rayées de la carte. Ce n’est pas un scénario lointain, mais la réalité que dessinent les chiffres de l’IPBES. Cette disparition massive de la vie, à un rythme inédit, bouleverse les cycles naturels et dérègle le fonctionnement d’écosystèmes dont dépend l’équilibre du climat.
L’effondrement des populations de pollinisateurs, l’érosion des sols, la chute des stocks de poissons : voilà des exemples concrets qui ne relèvent plus de la prospective. Ces dérèglements affectent de plein fouet notre approvisionnement alimentaire et le tissu économique des territoires. Dans ce contexte, les inégalités sociales se creusent, frappant d’abord celles et ceux qui disposent de moins de moyens pour s’adapter.
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La crise de la biodiversité : comprendre l’ampleur et les causes d’un bouleversement mondial
Jamais la biodiversité n’a connu une telle pression. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) alerte : plus de 42 000 espèces sont désormais menacées d’extinction. Depuis cinquante ans, la dynamique s’accélère, portée par une succession de facteurs humains : transformation des milieux naturels, destruction des habitats, exploitation sans retenue des ressources, pollution généralisée, dissémination d’espèces exotiques envahissantes, sans oublier le réchauffement global.
Les chercheurs du CNRS et du WWF le martèlent : les écosystèmes vacillent, partout sur la planète. La France ne fait pas exception. Près d’un tiers de ses espèces animales sont aujourd’hui menacées. De la canopée amazonienne aux côtes méditerranéennes, les pertes s’accumulent, année après année. Malgré les signaux d’alarme lancés à Kunming et ailleurs, le rythme ne fléchit pas.
Pour mieux saisir l’ampleur du phénomène, voici trois évolutions majeures qui dessinent ce bouleversement :
- Disparition de nombreuses espèces animales sauvages
- Déclin rapide des espèces végétales
- Transformation profonde des cycles naturels fondamentaux
La perte de biodiversité ne se limite pas à la disparition de quelques espèces spectaculaires. Elle déstructure les équilibres, affaiblit les réseaux alimentaires, modifie la composition des sols comme la qualité de l’eau. Les rapports de l’IPBES dressent le constat d’un bouleversement global, dont la responsabilité revient à l’ensemble des sociétés humaines. On ne débat plus de la gravité du problème : la question est désormais de savoir comment agir, et vite.
Quels liens entre perte de biodiversité, changement climatique et équilibre de nos sociétés ?
Le changement climatique et la disparition de la biodiversité avancent ensemble, deux forces qui s’additionnent et aggravent leurs effets respectifs. Une forêt qui part en fumée, une zone humide asséchée : la Terre perd à chaque fois un précieux puits de gaz à effet de serre. Le réchauffement s’accélère, les services écosystémiques s’amenuisent.
Ces services écosystémiques, comme la régulation du climat, le filtrage de l’eau douce ou la pollinisation, dépendent d’une multitude d’espèces animales et végétales. Leur raréfaction fragilise notre sécurité alimentaire, notre santé, et même la disponibilité d’une eau saine. Selon l’IPBES, un million d’espèces sont menacées d’extinction : la stabilité de nos sociétés vacille avec elles.
Pour mesurer concrètement ces impacts, trois exemples parlants :
- Suppression des zones humides : multiplication des inondations et des sécheresses
- Chute des populations d’animaux sauvages : rupture dans les chaînes alimentaires
- Moins de végétation : baisse de la capacité à absorber le CO₂
La nature ne se résume pas à un décor. Elle structure nos sociétés, assure des équilibres invisibles, façonne nos territoires. Le dernier rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’environnement le rappelle sans détour : préserver la biodiversité, c’est se protéger contre l’instabilité climatique et les secousses sociales. Quand les écosystèmes sont affaiblis, c’est l’ensemble du tissu économique et social qui encaisse le choc, sur tous les continents.
L’économie, la santé, l’alimentation : pourquoi préserver la biodiversité est vital pour l’humanité
La biodiversité constitue la base du capital naturel : tout ce qui fait tourner l’économie, la santé humaine et la chaîne alimentaire mondiale en dépend. Les services écosystémiques, un concept central pour l’IPBES, recouvrent tous les bénéfices que nous tirons des milieux naturels : régulation du climat, pollinisation, filtration de l’eau, fertilité des sols.
Agriculteurs, éleveurs, pêcheurs : chacun dépend de cette diversité. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, près de 75 % des cultures alimentaires mondiales tirent profit du travail discret des pollinisateurs, en grande partie des insectes. Leur raréfaction met d’ores et déjà en danger la production agricole, et avec elle, la stabilité et la qualité de notre alimentation.
La question sanitaire surgit avec force. La majorité des nouveaux agents pathogènes qui affectent l’humain proviennent d’animaux sauvages ou domestiques. Quand les écosystèmes se dégradent, les contacts entre espèces s’intensifient, ouvrant la voie à l’émergence de zoonoses. Protéger la biodiversité, c’est aussi limiter à la source ces risques sanitaires.
Sur le plan économique, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité chiffre le coût de la destruction des milieux naturels à plusieurs milliards d’euros chaque année. Baisse de la productivité agricole, raréfaction des ressources de pêche, multiplication des catastrophes naturelles : les pertes s’accumulent, et les services écosystémiques disparus ne se reconstituent pas d’un coup de baguette magique. Chaque espèce rayée de la carte, chaque habitat détruit, creuse un déficit dont héritent les générations suivantes.
À ce rythme, c’est la trame même du vivant qui se délite. Face à l’ampleur du défi, une question s’impose : combien de temps accepterons-nous de rogner sur ce capital sans lequel toute société s’effondre ?
